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Les Présocratiques Sébastien Bassu

Les Présocratiques

Biographies et liste des philosophes présocratiques

Établir une biographie exhaustive et assurée des philosophes présocratiques est une tentative qu’on ne peut mener à bien, vu l’incertitude et la diversité des témoignages anciens. Ainsi, quand nous voulons entreprendre une étude sur les Présocratiques, nous sommes d’emblée mis en face du problème des sources permettant de reconstituer la vie et l’œuvre philosophique de ces penseurs.

La classification et la dénomination « philosophes présocratiques » trouve son origine dans les Universités européennes du xixe siècle à une époque tardive, à la suite de la constitution d’une tradition de commentaires sur les penseurs grecs et la philosophie ancienne. C’est ainsi que les limites du corpus que l’on appelle aujourd’hui « présocratique » remonte à la classification et à l’anthologie de textes réalisées par Hermann Diels, publiée en 1903 à l’usage de ses étudiants dans un recueil de fragments et de témoignages intitulé Die Fragmente der Vorsokratiker (Les fragments des Présocratiques).

A donc été regroupé sous ce titre un ensemble de penseurs, pour la plupart antérieurs à Socrate, ce dernier marquant, dans l’esprit des savants du siècle dernier, l’âge de l’apparition de la philosophie, d’où l’appellation de « pré-socratique », les penseurs ayant vécu avant Socrate (dont la mort remonte à l’année 399 av. J.-C.). Cette dernière donnée n’est, d’ailleurs, pas toujours respectée puisque Démocrite, par exemple, compté parmi les Présocratiques, est plus jeune que le philosophe d’Athènes. Ainsi, la classification de Diels est-elle très large tant du point de vue des dates que des genres littéraires représentés puisque son ouvrage rassemble tant des poètes archaïques (comme Orphée) que des « philosophes », les uns écrivant en vers comme Parménide, d’autres sous forme d’aphorismes comme Héraclite, d’autres encore proposant des traités en prose Sur la Nature

Dans ces circonstances, il nous apparaît nécessaire de sélectionner à notre tour un échantillon de penseurs présocratiques parmi les plus significatifs. La liste sur laquelle nous travaillerons n’aura rien d’original, mais elle sera établie à partir des principales figures philosophiques reconnues par la tradition. Deux écoles principales semblent se dégager: l’école venue d’Ionie, dont l’initiateur est Thalès de Milet; et l’école italique, qui réunit l’école pythagoricienne et l’école éléatique. Ce découpage suit la présentation faite par l’une des principales sources des présocratiques, à savoir Diogène Laërce dans son ouvrage Vies, doctrines et sentences des philosophes illustres.

Le tableau suivant indique les principaux penseurs et leur appartenance :

– l’école ionienne : Thalès, Anaximandre, Anaximène, Anaxagore ;

– l’école pythagoricienne : Pythagore, les Pythagoriciens antiques, Empédocle, Philolaos, Archytas;

– l’école éléatique : Xénophane, Parménide, Zénon, Mélissos, les atomistes Leucippe, Démocrite, certains sophistes comme Protagoras.

Le présent article ne peut prétendre à reconstituer l’œuvre de l’ensemble de ces penseurs, il se limitera aux principaux noms, ceux qui ont été retenus, et il s’efforcera surtout de dégager l’unité des réflexions, leurs articulations, tout en soulignant les différences. Dans cette perspective, nous retiendrons les figures suivantes: Thalès, Anaximandre et Anaximène, représentant l’origine ionienne ; Pythagore et l’école pythagoricienne ; Parménide et l’école éléatique ; enfin Héraclite dont l’œuvre semble échapper à une tradition déterminée.

  • L’école de Milet: indications biographiques sur Thalès, Anaximandre et Anaximène

Thalès est considéré comme le fondateur de la philosophie ionienne. Citoyen de Milet, sa chronologie est difficile à établir. Sa naissance remonterait au plus tard autour de l’année 640 av. J.-C. Il aurait vécu, selon les témoignages, entre 78 et 90 ans, ce qui place la date de sa disparition dans une fourchette allant de 560 à 540 av. J.-C. Ces indications ne sont que des approximations très discutées qui reposent sur certaines données « objectives » : ainsi, Thalès aurait vécu au temps de Solon et de Crésus, dont nous connaissons beaucoup mieux la chronologie ; Thalès aurait prédit aussi une éclipse solaire qui est généralement placée à la fin du viie siècle.

Thalès a certainement vécu dans une cité grecque qui, pendant la période archaïque, fut la principale cité de la Méditerranée grecque. Située sur la côte ionienne (l’actuelle côte turque, à l’embouchure du Méandre), Milet développa une puissance maritime et commerciale qui lui permit d’étendre son influence sur les principales cités grecques de la côte ionienne. Au vie , c’est à Milet qu’il revint d’être le cœur de la vie culturelle grecque. Ce fut donc dans ce contexte que Thalès initia son œuvre d’une grande richesse puisqu’elle portait à la fois sur les sciences (mathématiques, astronomie), sur les arts (techniques de mesures) et sur la philosophie de la nature. C’est pourquoi il fut classé, dès la période classique, parmi les sept sages de la Grèce antique.

La vie de son successeur, Anaximandre, est encore moins connue, mais sa naissance est généralement datée en 611 av. J.-C. Il aurait rédigé son ouvrage à l’âge de soixante-quatre ans à la fin de sa vie. Son livre Peri phuseôs est souvent désigné comme le premier écrit philosophique des Grecs. Comme son maître Thalès, il s’illustra dans de nombreux domaines: en astronomie, il aurait mesuré l’inclinaison de l’écliptique et inventé le cadran solaire ; il serait le premier à avoir dressé une carte de la terre suivant la représentation du monde connu par les Grecs de cette époque ; il eut aussi des fonctions politiques importantes puisqu’il conduisit la colonie milésienne à Apollonie.

Enfin, Anaximène se présente comme le dernier milésien de la lignée. Nous ne savons presque rien de sa vie. Il était disciple d’Anaximandre, il serait né vers 529-525 av. J.-C. Il ne reste qu’un mince fragment de l’ouvrage d’Anaximène.

Enfin, Anaximène se présente comme le dernier milésien de la lignée. Nous ne savons presque rien de sa vie. Il était disciple d’Anaximandre, il serait né vers 529-525 av. J.-C. Il ne reste qu’un mince fragment de l’ouvrage d’Anaximène.

La vie de Pythagore a fait l’objet de plusieurs ouvrages dont les plus connus sont la Vie de Pythagore de Jamblique et la Vie de Pythagore de Porphyre. Malheureusement, Pythagore fit l’objet, dès sa vie semble-t-il, d’un culte qui contribua, progressivement, à transformer la figure humaine de PythagoMre en une figure quasi-divine et sacrée. Cette « héroïsation » de Pythagore ne facilite pas la reconstitution de la véritable figure historique, car de nombreuses légendes lui ont été rattachées. En outre, cette transformation est l’objet d’une évolution historique : les premiers auteurs, comme Aristote, parlent plus généralement de la doctrine pythagoricienne. Ce ne sont que les auteurs tardifs qui proposent une biographie détaillée et exhaustive de Pythagore. Ainsi, la tradition nous fournit sur la vie de Pythagore d’autant plus de détails qu’elle est plus éloignée de l’époque où les faits se sont produits, ce qui jette un léger discrédit sur la teneur historique de ces ouvrages.

Pythagore serait né approximativement vers 580 av. J.-C. à Samos, une île grecque de la mer Égée, proche de l’Asie Mineure. Son père s’appelait Mnésarque. À l’âge de dix-huit ans, il participa aux jeux olympiques en tant qu’athlète. Pythagore aurait réalisé plusieurs voyages en dehors de Grèce, en particulier chez les Égyptiens, d’où il aurait ramené certaines idées (transmigration des âmes) et

certaines connaissances (mathématiques et astronomiques). Il quitta définitivement Samos vers 530 pour se rendre en Italie du sud, à Crotone, afin de fuir la tyrannie de Polycrate. C’est à Crotone que Pythagore réalisa la majeure partie de son enseignement et qu’il réunit autour de lui une école faite de nombreux disciples. À partir de son enseignement, des disciples fondèrent d’autres écoles dans les cités grecques et participèrent à la renommée de l’école. Cependant, une révolte éclata à Crotone contre les Pythagoriciens qui assuraient alors des fonctions politiques majeures, ce qui poussa Pythagore à quitter la ville pour s’installer à Métaponte, entre 510 et 500, où il serait mort. La plupart des pythagoriciens moururent lors de l’incendie criminel de leur école à Crotone.

Il faut aussi faire preuve de prudence quand nous attribuons à Pythagore tel ou tel point de doctrine. Dans ce contexte, il est préférable de ramener des points de doctrine aux pythagoriciens ou à l’école pythagoricienne, à la manière d’Aristote.

À la suite de Pythagore, le pythagoricien le plus connu est Philolaos. Il était contemporain de Socrate et de Démocrite, au cours du ve siècle av. J.-C. Peu de temps après, dans la première partie du ive siècle, ce fut avec Archytas que le Pythagorisme acquit dans la Grande Grèce une nouvelle importance politique et philosophique.

  • L’école éléatique: éléments de biographie de Parménide

« Parménide, fils de Pyrès, fut le disciple de Xénophane », ainsi commence la Vie de Parménide d’après Diogène Laërce. Il est né dans une famille riche et puissante d’Elée à la fin du vie siècle av. J.-C. Elée était une cité grecque située en Italie près du golfe de Salerne. La datation de sa naissance et de sa mort est principalement calculée sur un fait historique reconnu, à savoir son voyage à Athènes, lors duquel Socrate fit sa rencontre. Cet évènement est relaté par Platon dans le dialogue du Parménide. Parménide avait alors un âge avancé. Cet évènement est ainsi daté autour de 451 à 449. Parménide était alors proche de la fin de sa vie. L’année de sa naissance peut donc être ramenée autour de 520-510 av. J.-C.

Contrairement à Pythagore, sa doctrine est bien connue, et il est assez aisé de la reconstituer pour plusieurs raisons. La première raison est que nous connaissons de Parménide un poème dont l’authenticité ne fait pas de doute : De la nature (περὶ φύσεως). Ensuite, sa doctrine a donné lieu à de nombreux témoignages sérieux et fiables, réalisés par des auteurs proches de sa période d’activité, comme Platon et Aristote. Enfin, son œuvre a perduré à travers l’activité de disciples très connus tels que Zénon d’Elée.

  • Éléments biographiques d’Héraclite d’Éphèse

Héraclite d’Éphèse, fils de Bloson ou d’Héracon, descendait d’Androclos, fils du roi d’Athènes Codrus et fondateur de la cité d’Éphèse. Il est né autour de -540 et il meurt au milieu du ve siècle. Éphèse est l’une des plus anciennes colonies grecques

d’Asie mineure, située sur la côte ionienne (actuelle Turquie). Par sa naissance, Héraclite pouvait prétendre à des privilèges politiques et religieux qu’il céda à son frère. Héraclite est reconnu pour avoir écrit un ouvrage Sur la nature, dont il nous reste un certain nombre de fragments. Il était réputé pour son style obscur, Aristote soulignait la difficulté de ponctuer ses phrases, et la diversité des ponctuations possibles rend difficile l’interprétation de sa pensée. Socrate disait au sujet de son ouvrage, d’après une anecdote relatée par Platon, qu’il fallait être un bon nageur de Délos pour venir à bout de son ouvrage, faisant ainsi référence à la très grande difficulté de parvenir au fond. Il acheva son ouvrage en 478 environ av. J.-C. Il le déposa dans le temple d’Artémis qui fut brûlé, dit-on, par l’un de ses disciples.

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