Éloge de la solitude – ARTHUR SCHOPENHAUER
ARTHUR SCHOPENHAUER
ARTHUR SCHOPENHAUER: Philosophe alle-mand, il élabore une philosophie fondamentalement pessimiste qui influença Nietzsche. Ce qu’il appelle le vouloir-vivre (désir, instinct, affinité…) est « la plus intime essence de toute chose ». Cette « volonté » universelle qui anime le monde n’a aucun sens rationnel et la vie elle-même n’est qu’une suite de douleurs entrecoupée de brefs plaisirs. La libération de l’homme par la négation du vouloir-vivre est le fait, d’une part, de la contemplation artistique qui le détache des choses et de lui-même, d’autre part de la pitié qui lui fait partager la douleur d’autrui.
Le Monde comme volonté et comme représentation (1818).
Éloge de la solitude
Et tout d’abord toute société exige nécessairement un accommodement réciproque, une volonté d’harmonie : aussi, plus elle est nombreuse, plus elle devient fade. On ne peut être vraiment soi qu’aussi longtemps qu’on est seul ; qui n’aime donc pas la solitude n’aime pas la liberté, car on n’est libre qu’étant seul. Toute société a pour compagne inséparable la contrainte et réclame des sacrifices qui coûtent d’autant plus cher que la propre individualité est plus marquante. Par conséquent, chacun fuira, sup-portera ou chérira la solitude en proportion exacte de la valeur de son propre moi. Car c’est là que le mesquin sent toute sa mesquinerie, et le grand esprit, toute sa grandeur ; bref, chacun s’y pèse à sa vraie valeur.
LA SOURCE DU TEXTE
ARTHUR SCHOPENHAUER, Aphorismes sur la sagesse dans la vie, trad. A. Cantacuzène, P.U.F., p. 101.